Une reprise lente
En 2021, la reprise économique a été soutenue par une hausse de la consommation des ménages et des investissements. Toutefois, une grande partie de la croissance était due à un effet de base favorable et le niveau pré-pandémique n'a pas été atteint. En outre, l'Ukraine a bénéficié d'une forte hausse des prix de ses principaux produits d'exportation, notamment les céréales et le fer. L'augmentation du volume des exportations, grâce à de bonnes récoltes, devrait encore contribuer aux premiers mois de 2022. Néanmoins, cet effet s'estompera dans le reste de l'année, d'autant que la demande extérieure pourrait se stabiliser. La consommation des ménages (74 % du PIB) restera un moteur de la croissance, l'inflation ralentissant en raison de l'augmentation des effets de base et de la stabilisation des prix des composantes les plus inflationnistes. La hausse des prix des denrées alimentaires et de l'énergie a fait accélérer l'inflation à 11 % en septembre 2021, ce qui a déclenché plusieurs hausses des taux d'intérêt de la Banque nationale d'Ukraine (atteignant 8,5 % à partir de novembre 2021).
La pandémie de COVID-19 représente toujours un risque pour le processus de reprise. Le nombre de cas et d'hospitalisations a augmenté en raison de la lenteur du processus de vaccination à l'automne 2021. En effet, l'Ukraine affiche l'un des taux de vaccination les plus faibles d'Europe, avec seulement 17,2 % de la population entièrement vaccinée à la fin du mois d'octobre 2021 et une forte hésitation à se faire vacciner. Selon un sondage de la Fondation des initiatives démocratiques, environ 56 % des Ukrainiens ne sont pas disposés à se faire vacciner. Dans le même temps, les entreprises sont conscientes que cela pourrait limiter le processus de reprise. Selon l'enquête publiée en septembre 2021 par la Chambre de commerce américaine et Citi Ukraine, 61 % des entreprises interrogées ont indiqué que la possibilité d'un nouveau confinement était leur principale préoccupation. D'autre part, 93 % des entreprises interrogées ont affirmé que l'éradication de la corruption et la mise en œuvre de véritables réformes judiciaires sont des mesures cruciales que le gouvernement devrait prendre pour améliorer le climat des affaires et attirer les investissements étrangers. En effet, la faiblesse du processus de mise en œuvre des réformes affecte le climat d'investissement dans le pays, avec pour conséquence un impact sur l'économie.
Amélioration des finances publiques sous la supervision du FMI
Les envois de fonds des expatriés (10 % du PIB, principalement en provenance de Pologne, de Hongrie et de la République tchèque) restent importants, non seulement pour soutenir la consommation des ménages, mais aussi pour contribuer aux comptes extérieurs. En effet, le solde du compte courant est devenu exceptionnellement positif (3,4 %) en 2020 grâce, notamment, à la résilience des envois de fonds, alors qu'il serait tombé au-delà de -6 % sans cette contribution. Les transferts de fonds profitent également aux finances publiques par le biais de la taxe sur les ventes. Habituellement, la balance courante affiche un déficit dû aux revenus rapatriés par les investisseurs étrangers, ainsi qu'un déficit du tourisme et des échanges de biens, que les envois de fonds et les recettes du transport de marchandises (gaz, camionnage) ne compensent que partiellement.
Le déficit budgétaire se réduit depuis que l'année pandémique 2020 l'a fait se creuser, et devrait progressivement retrouver son niveau d'avant la pandémie, mais probablement seulement après 2022. Parallèlement, l'accès de l'Ukraine aux financements extérieurs reste important pour les finances publiques, notamment pour les besoins budgétaires à court terme, y compris les remboursements de la dette extérieure. L'Ukraine doit recevoir 2,7 milliards USD (10 % des réserves en devises) dans le cadre d'une allocation de droits de tirage spéciaux (DTS) par le Fonds monétaire international (FMI). La première tranche (1,9 milliard USD) a été reçue en août 2021. En octobre 2021, il a été annoncé que l'Ukraine recevrait un décaissement de 700 millions USD et obtiendrait une prolongation de son programme de prêt de 5 milliards USD jusqu'en juin 2022. Auparavant, les décaissements de prêts étaient bloqués en raison de préoccupations concernant les réformes et l'indépendance de la banque centrale. Le maintien de la coopération avec le FMI est crucial pour la stabilité financière de l'Ukraine, surtout si l'on considère les besoins élevés de financement extérieur du pays. En effet, la dette extérieure constitue 54 % de la dette totale de l'État, principalement libellée en USD.
Le gouvernement se concentre sur la réforme anti-corruption.
En 2019, Volodymyr Zelenskiy, acteur et producteur de télévision, remporte l'élection présidentielle avec plus de 73 % des voix, après être entré en politique quatre mois plus tôt. Quelques mois plus tard, son Parti Serviteur du Peuple obtient la majorité absolue (251 sièges sur 450) aux élections législatives. Cependant, le Serviteur du Peuple a vu son soutien s'effondrer au cours des deux dernières années. Les derniers sondages montrent une baisse du soutien, passant de 43 % de voix obtenues au moment des élections à 14 % en octobre 2021. Les prochaines élections présidentielles et législatives sont prévues en 2024.
Le gouvernement entend démontrer un progrès dans la reconstruction des infrastructures de lutte contre la corruption afin d'améliorer le climat d'investissement et d'obtenir le financement du FMI. Dans son indice de perception de la corruption 2020, Transparency International a classé l'Ukraine au 117e rang sur 180 pays dans le monde, lui accordant 33 points sur un maximum de 100, où zéro indique que « la corruption remplace effectivement le gouvernement ». En octobre 2021, le Parlement a adopté une nouvelle loi renforçant l'indépendance du Bureau national anticorruption de l'Ukraine.