TIC

Asie-Pacifique
Risque moyen
Europe centrale et de l'est
Risque moyen
Amérique Latine
Risque élevé
Moyen-orient et Turquie
Risque élevé
Amérique du Nord
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Europe de l'Ouest
Risque moyen

Résumé

Points forts

  • Secteur innovant capable de créer de nouveaux relais de croissance (Internet des objets, big data, intelligence artificielle…).
  • Croissance de la demande soutenue et durable grâce à la numérisation des activités économiques et des modes de vie (segments des semiconducteurs, services et logiciels informatiques).
  • Biens et services en TIC souvent à forte valeur ajoutée et générant des marges élevées (segments des semiconducteurs, services et logiciels informatiques).
  • Marchés de produits souvent concentrés du fait de barrières à l’entrée élevées (recherche et développement, infrastructures de réseaux, usines…), en particulier dans les semiconducteurs et télécoms.

Points faibles

  • Environnement réglementaire de plus en plus contraignant au niveau national ou régional (protection des données, anti-trust…) du fait de l’importance économique et stratégique croissante du secteur.
  • Vulnérabilité croissante aux risques géopolitiques (conflits commerciaux, sanctions internationales, risque cyber).
  • Semi-conducteurs : activité particulièrement cyclique avec une récession tous les quatre à cinq ans en moyenne.
  • Télécommunications : niveaux d’endettement élevés et coûts du service de la dette en hausse.
  • Produits électroniques et télécoms : segments matures en proie à une forte concurrence sur les prix.

Evaluation des risques sectoriels

La croissance des ventes s’est accélérée en 2024 et au premier semestre 2025 dans le secteur des technologies de l'information et de la communication (TIC), mais la détérioration de l’environnement du commerce international fait planer une menace sur de nombreux segments qui dépendent fortement de flux de marchandises stables et fluides.

Principaux bénéficiaires de la tendance séculaire à la numérisation des activités économiques et des modes de vie, les services informatiques et logiciels ainsi que les semiconducteurs continueront de surperformer avec des taux de croissance à deux chiffres en 2025. Plus matures, les segments des services de télécommunications et de la fabrication de produits électroniques enregistreront une croissance plus modeste.

Le secteur dans son ensemble place beaucoup d’espoir dans l’essor de l’intelligence artificielle. Gourmande en puces, serveurs, logiciels et services nécessaires au développement et au déploiement de ses applications les plus avancées, la technologie pourrait avoir un effet d’entrainement puissant et durable sur l’ensemble du secteur si son potentiel se révélait à la hauteur des attentes qu’elle génère.

Perspectives économiques du secteur

Matériel électronique : l’incertitude liée à la politique commerciale américaine menace une reprise déjà modérée

La plupart des segments du marché des équipements électroniques devraient enregistrer une croissance modérée en 2025, les expéditions mondiales de smartphones, d’ordinateurs personnels, de serveurs et de téléviseurs devant progresser respectivement de 2 %, 2 %, 5 % et 1 %. Les risques restent toutefois orientés à la baisse et pourraient entraîner une croissance négative des volumes. En particulier, une issue défavorable de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, entraînant une hausse des droits de douane, pourrait se traduire par une augmentation significative des coûts d’exploitation, entraînant une baisse de la demande et une rentabilité réduite pour les entreprises d’électronique grand public, tout en aggravant un contexte mondial déjà marqué par une croissance modérée des dépenses de consommation.

La plupart des marchés de produits du segment sont désormais très matures, les ventes mondiales de téléviseurs, d’ordinateurs et de smartphones ayant atteint leur pic respectivement en 2011, 2013 et 2016. Les ventes sont principalement tirées par les achats de remplacement d’équipements existants, et dans une moindre mesure, par les premiers achats dans les économies émergentes. La faiblesse de la croissance des volumes s’est traduite par une concurrence féroce pour les parts de marché au cours de la dernière décennie, les challengers chinois ayant souvent évincé les anciens leaders japonais, européens et américains.

Pour échapper à la concurrence par les prix et pouvoir justifier de prix plus élevés, les entreprises continuent d’innover en lançant de nouveaux appareils plus performants (connectivité, résolution d’écran, puissance de traitement, efficacité énergétique…), intégrant des services complémentaires (comme les abonnements à du contenu) ou au logiciel et à l’interface utilisateur améliorés. Les nouveaux appareils intégrant l’intelligence artificielle n’ont, jusqu’à présent, eu aucun impact significatif sur les cycles de remplacement du matériel, les consommateurs restant peu convaincus par les fonctionnalités supplémentaires offertes par cette technologie.

Semiconducteurs : début d’un nouveau cycle de croissance

Les ventes mondiales de semi-conducteurs devraient dépasser pour la première fois la barre des 700?milliards de dollars en 2025 (+11?%), selon WSTS, portées principalement par des prix en hausse dans les segments critiques (notamment les puces mémoire), reflet d’un déséquilibre persistant entre l’offre et la demande, ainsi que d’une amélioration du mix produit, avec davantage de puces intégrant les dernières technologies de TSMC et Samsung arrivant sur le marché. Le cycle actuel est largement tiré par l’explosion de la demande en puces alimentant l’essor des infrastructures d’intelligence artificielle, particulièrement notables dans les régions des Amériques (+45?% en 2024) et de l’Asie-Pacifique (+16?%). En revanche, le Japon (ventes stables en 2024) et l’Europe (–8?%) devraient continuer à enregistrer une demande atone en 2025, car ils dépendent davantage des puces à bas prix et à gros volume, typiques des marchés finaux comme l’automobile et, plus généralement, l’industrie. Reflétant ce rythme à deux vitesses dans le secteur, de nombreuses entreprises de semi-conducteurs ne sont pas encore sorties de la récession de 2022–2023 et ne connaîtront qu’une croissance modérée en 2025. La situation est d’autant plus préoccupante dans les segments automobile et industriel que les capacités mondiales augmentent rapidement, avec la Chine en tête.

Le cycle actuel des semi-conducteurs, porté par l’IA, présente des risques importants, que cette technologie tienne ou non ses promesses. Si l’IA ne parvient pas à faire émerger des applications rentables, les investissements massifs réalisés tout au long de la chaîne de valeur des semi-conducteurs pourraient se défaire rapidement, entraînant une récession profonde et prolongée du secteur. À l’inverse, si l’IA tient ses promesses et que la demande explose, les capacités de production existantes pourraient être dépassées, provoquant de nouvelles pénuries de puces susceptibles de perturber un large éventail d’industries. Dans les deux cas, la volatilité et l’ampleur des investissements liés à l’IA rendent ce cycle particulièrement précaire pour les chaînes d’approvisionnement mondiales et la stabilité économique.

Les risques géopolitiques constituent un autre facteur de plus en plus préoccupant, la rivalité technologique croissante entre les États-Unis et la Chine redéfinissant progressivement les flux commerciaux mondiaux. La mise en place de contrôles à l’exportation, de listes noires et de systèmes d’autorisations a créé de nouveaux goulets d’étranglement dans des domaines critiques comme les puces pour l’intelligence artificielles et les équipements de fabrication de puces, augmentant la probabilité de perturbations des chaînes d’approvisionnement. Parallèlement, les entreprises américaines de semi-conducteurs voient leurs débouchés se réduire, certaines générant jusqu’à la moitié de leurs chiffres d’affaires sur le marché chinois. La pression croissante pour se conformer aux réglementations géopolitiques expose également les petites entreprises à des risques financiers et opérationnels importants. En outre, la divergence des normes et des politiques commerciales entre les États-Unis et la Chine — et même au sein du bloc aligné sur les États-Unis — ajoute de la complexité et des coûts, pouvant entraîner une fragmentation et une réorganisation stratégique parmi les acteurs clés comme Taïwan, le Japon, la Corée du Sud et l’Europe.

Services et logiciels informatiques : les contraintes de main d’œuvre grèvent la croissance et tirent les coûts à la hausse

Le secteur des services et logiciels informatiques comprend les sous-segments du conseil, de la programmation, du traitement de données, des services gérés et du logiciel générant collectivement un chiffre d’affaires mondial de 2 600 milliards d’USD. Affichant une croissance annuelle moyenne de près de 9% au cours de la dernière décennie, il tire son dynamisme de l’usage par les entreprises et les administrations des technologies de l’information et de la communication pour améliorer leur efficacité.

Essentiellement constitué de marchés nationaux ou régionaux comme la plupart des activités de services, le secteur connaît toutefois une internationalisation croissante dans les segments du logiciel, des services gérés, de la programmation et du traitement de données. Au cours de la dernière décennie, les exportations de services IT par l’Inde et les Etats-Unis ont par exemple plus que doublé et représentent désormais plus de 150 milliards d’USD par an. Après le big data, le cloud computing et la cybersécurité, les entreprises du secteur misent désormais sur le déploiement des technologies d’intelligence artificielle pour accélérer encore leur croissance.

Répondre à la croissance de la demande constitue le défi principal des entreprises de ce secteur où la main d’œuvre constitue à la fois le premier poste de coût (entre 50% et 75% du chiffre d’affaires selon les segments) et la source principale de compétitivité. Ces dernières années, une pénurie de profils qualifiés a pesé sur la capacité des entreprises à répondre à la demande et tiré à la hausse les coûts salariaux. Le secteur doit également composer avec des exigences croissantes des autorités de régulation en matière notamment de collecte, d’hébergement et de sécurité des données (Réglementation Générale pour la Protection des données dans l’Union européenne) ou de contrôle des contenus illicites ou mensongers (Règlement sur les Services Numériques).

Télécommunications : les usages explosent, le chiffre d’affaires stagne

Le secteur des télécommunications génère un chiffre d’affaires annuel mondial de l’ordre de 1 400 milliards d’USD. Les marchés des télécommunications sont nationaux, oligopolistiques et le plus souvent dominés par un ancien monopole d’Etat. Les groupes internationaux y sont l’exception et ont pour la plupart, faute d’économies d’échelle ou de synergies suffisantes, sensiblement réduit leurs activités en dehors de leurs pays ou régions d’origine ces dernières années.

Porté par le développement rapide des réseaux fixes et mobiles dans les économies développées de 1995 à 2015, le secteur y est désormais largement mature et sa rentabilité fonction de la taille et du degré de concentration des marchés domestiques. A cet égard, les opérateurs américains bénéficient d’un marché à la fois vaste (330 millions d’habitants) et concentré (Verizon, AT&T et T-Mobile détiennent plus de 90% du marché) permettant des marges élevées. A l’inverse, les marchés européens restent nationaux et plus fragmentés et donc comparativement moins rentables.

Dans les pays émergents, le déploiement des télécommunications mobiles continue de soutenir une croissance peu rémunératrice du fait de revenus moyens par utilisateur (average revenue per user, ARPU) comparativement faibles. Le nombre d’abonnements à la téléphonie mobile et au haut-débit fixe dans le monde devrait croitre de 1% et 3% par an respectivement dans les cinq prochaines années. Après une décennie de croissance quasi-nulle, le chiffre d’affaires du secteur ne devrait progresser qu’à la marge sur la même période.

L’usage des télécommunications, pourtant, continue de croître à un rythme soutenu grâce au déploiement de réseaux fixes (fibre optique) et mobiles (5G) plus rapides et plus étendus. Les volumes de données échangés sur les réseaux mobiles et fixes dans le monde devraient ainsi progresser respectivement de 20% et 12% par an dans les cinq prochaines années. Le défi, pour les opérateurs télécoms, est de monétiser cette amélioration de la qualité du service auprès de consommateurs opportunistes et attentifs aux prix (pays développés) ou aux budgets contraints (pays émergents).

Auteurs et experts